À quand des embouchures dignes de nos didgeridoos !?

Il reste une partie encore non explorée du didgeridoo : son embouchure. L’arrivée de l’embouchure en bois au milieu des années deux mille s’est rapidement imposée comme la relève de la cire d’abeille. Malheureusement l’innovation s’est arrêtée là. Pourtant rien ne nous empêcherait de penser à des embouchures démontables en s’inspirant des embouchures des cuivres !

Le corps des didgeridoos ont fait l’objet de nombreuses explorations depuis plus de 20 ans maintenant. Les fabricants n’ont eu de cesse de creuser, de créer des formes, de tester des matériaux et différents processus de créations. Allant des didgeridoos en verre aux didgeridoos à coulisses, en passant par des didgeridoos démontables, les recherches ont eu bon train ! Toutes ces créations sont passionnantes. Mais il est surprenant de voir que l’embouchure y a échappé. Voilà donc une mise au point et quelques pistes destinées aux fabricants inventifs qui aimeraient creuser la dernière roue du carrosse !

Petit historique et avantages d’une embouchure en bois pour didgeridoo

Depuis des millénaires, les Aborigènes d’Australie utilisaient (et utilisent encore) de la cire d’abeille (lire aussi : 4 étapes pour faire son embouchure en cire d’abeille) récoltée dans le bush australien pour les embouchures de leur Yidaki ou Mago (lire aussi : Aux origines du didgeridoo : les Aborigènes d’Australie). Matériau naturel, facile à manier et à façonner, la cire d’abeille avait tous les avantages d’une bonne embouchure. C’est donc en toute logique, que les blancs ont gardé cette même technique pour les didgeridoos contemporains. Ainsi, encore actuellement, la majorité des didgeridoos vendus en Australie sont parés de ce qu’ils appellent de la «bee’s wax », comprenez de la cire d’abeille. Mais depuis le milieu des années 90, le didgeridoo s’est largement exporté dans le monde. Des européens et américains se sont mis à fabriquer leurs propres instruments et de nombreux joueurs ont commencé à souffler.

C’est au milieu des années 2000, que les premières embouchures en bois ont fait leur apparition. Aujourd’hui, la plupart des didgeridoos de milieu et haut de gamme sont couverts d’une embouchure en bois (ou en résine). Au départ, certains fabricants pensaient que les joueurs(ses) préféreraient avoir leur propres formes d’embouchure et que le bois ne serait pas adopté par tous, car trop normatif.

Quelques années plus tard, force est de constater que les avantages du matériau ont rapidement convaincu la majorité des passionnés de didgeridoo. Et pour cause, ils sont nombreux :

  • pas de risque que l’embouchure ne fonde au soleil (tous ceux qui ont laissé un didgeridoo dans leur voiture en été me comprendront !)
  • pas de ramollissement de l’embouchure, à l’instar de la cire qui a une fâcheuse tendance à ramollir et à se déformer après quelques minutes de jeu.
  • plus hygiénique, le bois se nettoie très facilement contrairement à la cire qui accumule parfois pas mal de saletés !
  • et enfin pour les hommes : le bois ne colle pas aux poils de barbes… la cire oui !

Ces embouchures en bois se sont donc normalisées sur la plupart des didgeridoos. Mais il semblerait que depuis cette amélioration certaine de l’embouchure, rien n’ai bougé. Bon, quand je dis que rien n’a bougé, je provoque un peu quand même. ? Car certains fabricants ont commencé à creuser des pistes, même si ils ne sont qu’au stade de balbutiement, ça vaut le coup d’aller y jeter un œil… Faisons donc un petit tour des recherches actuelles!

Quelques recherches sur les embouchures de didgeridoo

William Thoren

Embouchure incurvée de didgeridoo
Ce joueur américain a développé sa propre technique de multidrone. C’est à dire qu’il joue les sons situés en-dessous du bourdon du didgeridoo, ce que l’on appelle en français les sous-vibrations. Comprenez qu’il fait vibrer ses lèvres plus doucement que la note du didgeridoo, descendant ainsi la note de l’instrument. Pour maitriser un peu plus sa technique, il s’est inspiré de la forme des embouchure des cuivres et de leur cuvette (voir schéma ci-dessous). Cette emprunt aux cuivre a l’avantage de gagner en jouabilité pour sa technique de multidrone.
William ne s’est pas arrêté là. Ces embouchures sont légèrement courbées (cf photo ci-contre : mon ancien didgeridoo fabriqué par William et par Julien Doutaz, lire aussi : Ujazi didgeridoo – Un fabricant de didgeridoo qui monte !) pour mieux épouser la forme de la mâchoire, permettant de s’adapter à la bouche du joueur. C’est loin d’être bête comme idée et très confortable une fois que l’on s’y habitue ! Enfin, il est passé d’une forme circulaire à une embouchure ovale. Ce qui a pour avantage de mettre plus de lèvres dans le didgeridoo mais sans perdre la précision du bourdon.

Walter Strasser et David Defois

Le didgeridoo est un instrument en bois. Et comme tout matériaux vivant, le bois bouge, se déforme, travaille… Ainsi un didgeridoo a tendance a se désaccorder suivant la saison, la chaleur, l’hydrométrie… Et cela peut être un vrai problème lorsque l’on joue avec d’autres musiciens. Quelques fabricants ont donc développé une embouchure qui coulisse sur les premiers centimètres du didgeridoo. Cette astuce plutôt bien trouvée permet d’accorder son didgeridoo. Ainsi, Walter Strasser a développé une grande coulisse permettant d’accorder et de modifier les notes du didgeridoo (lire aussi : Plusieurs notes en un seul instrument, petit tour d’horizon des didgeridoos à coulisse !). Je précise que dans ce cas précis, les didgeridoo de Walter sont pensés comme des instruments à coulisse et pas uniquement comme des didgeridoos accordables.

Quant à David Defois (lire aussi : Interview de David Defois : créateur du didgeridoo-trombone !), il a développé le même système mais sur quelques centimètres. Le but étant ici de pouvoir accorder son instrument, très astucieux ! Alexis Rousselle et Laurent Fradet (Pivert) ont ensuite repris l’idée de David sur leur didgeridoo. Cette technique a le petit inconvénient d’avoir les premiers centimètre de la perce obligatoirement cylindrique, ce qui conditionne par définition le début de l’instrument… Mais sachons accepter que, dans ce bas monde, toute chose a ses avantages et ses inconvénients. 🙂

photo de différentes embouchures

Respectivement de gauche à droite : le Kromm Boud de David Defois, le système d’Alex-didge et celui de Pivert didgeridoo

didgeridoo à coulisse de Walter Strasser

Didgeridoo de Walter Strasser

Quelques idées d’innovation et de recherche

Le diamètre de l’embouchure

Je vous le disais plus haut, le diamètre actuel le plus répandu est de 30mm. Mais, on pourrait très bien imaginer que cette norme bouge dans les années à venir. En discutant avec

À quand des embouchures démontables ?!

Si l’on veut améliorer nos embouchures, il nous faut regarder du côté des cuivres. En effet, un même trompettiste pourra avoir plusieurs embouchures. Pourquoi alors, ne pas imaginer que cela soit possible sur nos chers bout de bois ? Une grande partie des didgeridoos haut de gammes actuels sont produits de A à Z grâce à la technique sandwich. Comprenez que l’eucalyptus creusé par les termites n’est plus le seul dans ce domaine. Même certains fabricants australiens, comme l’excellent CrooKedStiXz, fabriquent des didgeridoos sandwichs pour compléter leurs gamme de didgeridoos en eucalyptus. Dans ce contexte, on pourrait donc très bien imaginer une perce standardisée : 30 mm, 35mm, 40mm… avec des embouchures qui s’adapteraient à chaque perce. Ainsi si le morceau joué encourage aux attaques langues, la personne utiliserait telle embouchure. Tandis qu’un morceau plus méditatif serait joué avec telle embouchure. Il deviendrait alors naturel d’interchanger les embouchures suivant l’effet escompté.

Allons voir du côté des embouchures pour cuivres

schéma d'une embouchure de trompetteUne petite recherche sur Google m’a permis de trouvé un article qui parle des embouchures de trompettes. Voici donc le schéma qui y est présenté et quelques critères d’embouchures de cuivres rapidement expliqués (pour les plus curieux, je vous encourage à lire l’article complet sur le blog « apprendre la trompette« ).

Le diamètre de la cuvette et son bord

influe grandement sur la qualité du son et l’endurance du jeu. Plus votre cuvette est profonde et large, plus votre son sera « gros » et votre jeu de trompette sera « physique ».

La largeur du bord

Elle peut-être étroite ou large. Elle agira sur la souplesse et le confort des lèvres.

La forme du bord

Plat ou arrondie, on le choisit pour son confort sur les lèvres. Un bord plat et large augmente l’endurance tandis qu’un bord arrondi et fin marque plus les lèvres et améliore la souplesse.

Le bord intérieur

L’angle abrupt ou plus arrondi influe sur la souplesse et l’attaque.

La cuvette

Il en existe de plusieurs formes, en U, en V et aussi en combinant les deux. Une cuvette profonde procure un son rond et large. Une cuvette relevée facilite l’aigu et procure un son brillant et timbré.

Le grain

C’est le diamètre du trou de l’embouchure, il agit grandement sur la résistance de l’air émis dans la trompette. Un grain large donne un gros son et augmente la fatigue, un grain étroit facilite les aigus au détriment de la justesse.

La queue interne

Elle est une partie très importante de l’embouchure, car elle combine le choix cuvette/grain. Si vous prenez une queue large avec une cuvette relevée et un grain étroit, cela est contradictoire. Une queue large vous donnera un son généreux avec de belles harmoniques tandis qu’une queue étroite facilitera les aigus. Une bonne combinaison cuvette/grain/queue peut corriger ou détériorer la justesse de l’instrument, si vous avez le grave haut et l’aigu bas, essayez d’autres combinaisons. Bien que cette partie soit très importante pour les embouchures des cuivres, elle aura moins d’incidence pour le didgeridoo. En effet, le diamètre est beaucoup plus large chez notre bout de bois !

J’ai aussi trouvé cette vidéo (pas grand chose en français !) pour une rapide et succincte présentation des embouchures par Bernard Lienard, tubiste.

Conclusion : rêve ou réalité ?

Voilà déjà de quoi donner quelques pistes… Bien sûr le sujet reste à creuser mais soyez-en certains, tout reste à trouver ! Mais concrètement, est-ce réalisable ? La fabrication des didgeridoos milieu et haut de gamme est, on le sait, artisanale. Chaque artisan ayant ses propres codes, techniques et autres secrets de conception, il sera difficile d’arriver à une norme. Ainsi dans un premier temps, l’amélioration des embouchures ne peut se faire qu’individuellement, chez chaque fabricant. Il faut donc des chercheurs motivés, organisés, et qui ont le temps… Ce qui ne court pas les rues ! Ça n’est donc certainement pas demain que de telles embouchures arriveront sur le marché mondial, mais rien n’empêche d’y rêver. D’ailleurs, peut-être qu’un fabricant trouvera le moyen un jour ou l’autre d’adapter des embouchures à tous types de didgeridoo… Sait-on jamais !

Et vous ? Quelles seraient vos idées pour améliorer vos embouchures ? Vous jouez encore sur de la cire d’abeille ? Partagez votre expérience, ça fera avancer le débat !

À propos de l'auteur

Gauthier Aubé

Gauthier Aubé

Ami.e.s du didgeridoo bonjour ! Je m'appelle Gauthier Aubé et je suis le fondateur de Wakademy, l'école française du didgeridoo. Si vous vous demandez comment Wakademy peut vous aider à progresser au didgeridoo, je vous invite à visiter cette page. D'ici là, longue vie au souffle ! 💫

À vous la parole ! 🎤

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Augustin
2 années il y a

Bonjour, je suis trompettiste et je ne connaissais pas ce type d’embouchures merci pour ce partage.

Augustin
Augustin
Répondre à  Gauthier Aubé
2 années il y a

Bonsoir, Gauthier,
je voulais parler des embouchures de didgeridoo

Augustin
Augustin
Répondre à  Gauthier Aubé
2 années il y a

Oui merci à toi ton site est bien documenté !

Marcel
Marcel
5 années il y a

À titre d’information, ça peut donner des idées, je me suis fait une embouchure en plastique thermo formable, ça semble fonctionner.

Marcel
Marcel
Répondre à  Gauthier Aubé
5 années il y a

Pour mon embouchure j’utilise donc du plastic thermo formable, de la marque polymorph.
Ce sont des micro bille qu je fait chauffer dans de l’eau,ils deviennent transparente et malléable au alentour 60°C-75) la on peut leurs donner la forme que l’on veut.
Finalement, le plastique polymorphe est biodégradable, ne contient pas de matière dangereuses (non hazarddous material) et peut-être réutilisé (refondu) encore et encore.
Voila ce que je peut en dire.

Tiery Madeira
Tiery Madeira
6 années il y a

Bonjour Gauthier.
Je vous suis depuis peu, mais je trouve que vous avez de bon sujet concernant le didge. En autre celui-ci. Depuis 8 ans je vis en Colombie, et la chaleur ici est un sujet important avec tous ses désagrément…

Donc j’ai fini par trouver un moyen pour le moment pour remplacer la cire d’abeille. C’est une pâte nommée durepoxi.
Comme je pratique le didge que depuis le mois de janvier de cette année, je ne peu confirmer que c’est vraiment le mieux, mais perso cest nickel.

Voila espérant vous avoir apporté un petit plus. J’en profite pour vous remercier pour mavoir appris le souffle circulaire… Maintenant j’ai de grands efforts à faire pour le côté rythmique que je tente ici et là comme je peux avec YouTube parce qu’ici, il n’y a aucun cours. Au cas où jai une chaîne YouTube : tiery madeira.
Sur ce, bien a vous qui me lisez….
Tiery

Tiery Madeira
Tiery Madeira
Répondre à  Gauthier Aubé
6 années il y a

De rien Gauthier, vraiment pour l’avoir posté, je me sens honoré. En espérant que ce petit plus serve à l’édifice du grand Didgeridoo.

Entre temps, une charmante petite mamie, m’a suggéré une autre technique, qu’elle utilise pour faire des petites figurines pour sa crèche lors des fêtes de Noël. Elle utilise donc de la farine de maïs mélangée avec du bicarbonate pour en faire une pâte. Donc à voir aussi, tout en pensant qu’il faut au final l’imperméabiliser avec un éventuel verni. (La Colombie, est une grande source d’inspiration, bien que sa fame, ne soit pas au top … )

Voilà, encore merci pour cette attention, et au plaisir de vous lire.

Bien à toi qui me lis .

Tiery

Joyo
6 années il y a

Super article =)
Grace à ça je suis tombé sur le projet « Nu Mouthpieces ». Ils fabriquent des embouchures interchangeables pour transformer les instruments à vent en didgeridoos. https://www.kickstarter.com/projects/1615538060/nu-mouthpieces-bridge-low-brass-and-didgeridoo-tec
ils ont aussi une page facebook avec plus de vidéos: https://www.facebook.com/numouthpieces/
Ca veut aussi dire que le joueur peut jouer toutes les notes comme sur l’instrument original. Assez classe !

Jibé
Jibé
6 années il y a

Salut Gauthier.
Merci pour ton article, il tombe à pic.
Je suis en train de regarder sérieusement les didges d’andrea furlan. Il vend ses didgeridoo slide avec plusieurs embouchures sur mesure. Il suffit de la mettre sur le manchon et c’est bon!
Est ce que tu en sais plus?
Bye

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